Ria d’Etel, les ostréiculteurs dans la tourmente

Plusieurs semaines que je vous parle de Jean-Noel Yvon, celui que j’appelle « mon ostréiculteur ». Il est dans l’actualité hélas, avec cette histoire de cargo échoué. Aujourd’hui, ils doivent se défendre pour avoir une chance d’être indemnisés.
Hier et avant-hier j’étais avec lui, je l’ai vu et entendu répondre aux interview journalistes télé et radio. Il n’y avait personne de la presse sauf la locale, moi Ouest-France et mon collègue du Télégramme.
Voilà l’article que j’ai rédigé pour mon canard.
Je vais à présent les rejoindre.
Les faits :
Dans la nuit du 15 au 16 décembre un cargo maltais s’échoue sur la plage de Kerminihy déversant son fioul de propulsion dans les vagues qui cognent la plage. Le vent et la marée montante entraînent avec eux le goémon souillé du carburant. Ils pénètrent dans la ria, entraînant un certain nombre de conséquences immédiates dont les premiers témoins et victimes sont les ostréiculteurs.
La veille au soir :
Sachant la venue de ce fort coup de vent, la plupart des ostréiculteurs qui ont l’habitude de vivre avec les aléas météorologiques, remontent à terre les huîtres prévues pour les fêtes de Noël. Le bassin insubmersible dont l’eau a été pompée et renouvelée, est rempli des mannes qui seront commercialisées les prochains jours. C’est toujours ce qui est fait en cas de grand vent pour éviter la dispersion des huîtres déjà triées dans les parcs.
Le jour du constat :
Jean-Noël Yvon, ostréiculteur de Locoal-Mendon et ses collègues sont avertis de la catastrophe. Au PC Polmar créé à la mairie d’Etel, on s’organise promptement. Les décisions sont prises, un tour de la ria est fait pour constater la présence ou non de pétrole, des analyses urgentes sont demandées à l’IFREMER. Sur le terrain, les ostréiculteurs se regroupent avec leurs chalands, seuls bateaux capables de transporter les corps-morts pour les barrages flottants des pompiers.
Sur le chantier c’est l’effervescence, les appels des clients se posant des questions, les réserves émises sur les commandes… Une seule réponse apportée par le patron, « s’il y a le moindre doute de pollution, je ne vends pas ». Dans la démarche du label « cohérence », Jean-Noël Yvon ne veut pas tromper la confiance de ses clients dont plus de 80 % sont fidélisés.
Le soir :
Quatre petits barrages ont été installés pour stopper l’éventuelle pollution à venir.
Les nouvelles du cargo échoué prennent la tournure de l’étanchéité de la fuite.
Au matin :
À Etel, les phares et balises et son chef d’équipe de Lorient, Ronan Goavec sont venus avec du matériel lourd provenant de Saint-Nazaire et de Brest. Alors que le jour n’est pas encore levé, ils mettent à l’eau leurs canots pour gérer la mise en place du barrage avec ses corps-morts de trois tonnes. Le chaland de Jean Mahéo, président du syndicat des ostréiculteurs est réquisitionné, pour traîner à sa proue le corps-mort qui sera fixé à une longue et lourde chaîne, pour être largué selon la technique « du couteau » à un point précis du bord, localisé grâce à un GPS. Le deuxième corps-mort nécessaire sera largué un peu plus tard, dans la ligne précise du premier.
Le barrage :
Un long tube rouge qui sera gonflé d’air pour être étendu au travers de la ria. À son extrémité est fixée une tonne jaune qui servira de flotteur au barrage, permettant à celui-ci de réagir par rapport aux courants : il ouvre la ria quand la marée descend, et la ferme à marée montante.
Le soir du deuxième jour :
Alors que tout est fait pour limiter la casse, on constate un certain optimisme parmi les ostréiculteurs. La pollution est bien moindre que prévu, la surveillance est de chaque instant. Des équipes de professionnels uniquement, sont mises en place sur les plages pour dépolluer délicatement la couche de pollution à l’entrée de la ria. Sur l’eau on ne voit presque plus l’irisation de l’hydrocarbure.
Il faut attendre les résultats d’analyse, diligentés à l’Ifremer, qui seront connus, fait exceptionnel dû à l’urgence de la situation, dimanche matin.
Là, et seulement là, les ostréiculteurs sauront s’ils peuvent travailler ou non leurs huîtres encore sur parcs.
En attendant, « la confiance doit être de mise entre l’ostréiculteur responsable et ses clients. Les huîtres qui seront vendues ne devront comporter aucun danger ni aucune altération de goût », c’est la volonté expresse de ces professionnels de la mer.

Bilan du 18 décembre : les résultas d’analyse sont arrivés par SMS dans le cours de la journée : l’amont de la ria n’est pas touché. Les chantiers ostréicoles peuvent continuer leur travail et lever les huîtres des parcs pour l’entre deux-fêtes.
Les 6 exploitations ostréicoles qui seront fermées peuvent vendre leurs huîtres de bassin insubmersible (mise en bassin la veille de la tempête) et se fourniront en huîtres auprès de leurs collègues de la ria non touchés pour assurer leurs commandes d’après Noël.
C’est à la fois l’espoir et la solidarité qui prédominent dans la ria.

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